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Oussama Tabti

Vit et travaille à Marseille. Né en Algérie en 1988

www.oussamatabti.com

Tabti OUSSAMA, Shapes, 2017, Installation, Dimensions variables, ©Oussama Tabti

Tabti OUSSAMA, Sweet Home, 2018, Installation dessins et vidéo, Dimensions variables, ©Oussama Tabti

Tabti OUSSAMA, Meknine Ezzine, 2016, Installation sonore, Dimensions variables, ©Carlos Casteleira

Chabani, en arabe, désigne un homme aux cheveux blancs, la couleur de la sagesse et de la dignité. C’est le seul trésor que beaucoup de travailleurs immigrés algériens des années 60 ont pu conserver jusqu’à aujourd’hui. Arrivés en France pour participer à son glorieux essor, la plupart d’entre eux n’étaient pas déclarés et perçoivent aujourd’hui une très maigre retraite assortie d’une aide qui les contraint à rester en France. Oussama Tabti les rencontre régulièrement dans les cafés proches des marchands de sommeil qui leur louent des 16 m2 à partager à six. Ils portent fièrement le bleu de chine ou l’imperméable, le pantalon droits avec pli, la chapka, la cane en bambou. Dans Shapes Oussama Tabti a rassemblé ces éléments qui constituent ensemble une forme de portrait d’une figure sociale au seuil de l’oubli. Pour Montrouge, Oussama Tabti présente également une installation réalisée en collaboration avec des Chabanis à partir de dessins qui décrivent leur espace de vie à leur arrivée en France.

L’artiste appartient à une génération qui n’a connu de la décolonisation qu’une version officielle. Ainsi son travail se présente souvent comme la mesure de l’oubli ou de l’absence. Son œuvre Stand-By, 2011 présente par exemple les pages de livres empruntés à la bibliothèque de l’Institut Français d’Alger, dont les tampons de dates de restitution montrent une absence totale de consultation entre 1994 et 1999, correspondant aux terribles années de guerre civile. L’accumulation de ces documents montre un flagrant silence de la pensée, qui laisse entrevoir en creux la terreur d’une population civile sacrifiée dans un conflit sanglant nimbé de grandes confusions. La musique est souvent pour l’artiste la manifestation d’une échappée, un propos politique soluble dans l’air. L’œuvre Meknine Ezzine, 2016, se matérialise par un haut-parleur perché qui laisse entendre un chant de chardonneret, cinq fois par jour, à l’heure de l’appel des muezzins. Le titre Meknine Ezzine, en français joli chardonneret, est un standard de musique chaâbi, écrit par Mohamed El Badji après un séjour en prison en 1957. Chantant l’appel à la prière depuis sa cellule, ses geôliers lui disaient « Chante, chante, toi l’oiseau dans ta cage, chante l’amour ou la rage ».

François Quintin

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